Lexique monastique

Abbaye

Une abbaye (abbatia) est une communauté de moines gouvernée par un abbé (abbas). C'est un terme relativement récent : on ne le trouve qu'après le IXe siècle. Avant il n'est question que de "monastères" (maison où vivent des moines). Son usage se répand pour distinguer les monastères normaux ayant à leur tête un abbé, des monastères encore insuffisamment développés et gouvernés par un prieur.

Abbé

Dans l'évangile, le Christ appelle son Père "Abba" (Marc 14, 36). Ce terme sémitique revêt en araméen (la langue du Christ) une nuance d'intimité et de familiarité. Faisant écho à cette parole du Christ, saint Paul parle du cri de l'Esprit-Saint dans le coeur du Chrétien. Comme Jésus, ceux-ci sont poussés par l'Esprit filial à invoquer Dieu sous ce titre de Père : "Abba".C'est dans cette ligne que se situe cette appellation d' "Abbé", l'Abbé étant dans le monastère le représentant du Christ-Dieu. C'est à Dieu que le moine obéit quand il se soumet à son abbé. C'est la noblesse de l'obéissance monastique.Il faut ici se souvenir ici de ce que dit saint Benoît de l'abbé dans le second chapitre de sa Règle : "L'abbé tient dans le monastère la place du Christ". C'est en cette qualité de représentant du Christ, l'unique Maître, qu'on appelle le chef du monastère "abbé". Il porte ce titre parce qu'il parle au nom du Christ aux hommes réunis autour de lui. Saint Benoît y insiste avec force : le premier devoir de l'abbé est d'inculquer à ses moines l'enseignement de Jésus, de le leur rappeler par sa parole et son exemple.L'abbé est élu par ses frères, soit pour un temps indéterminé, qui maintenant prend fin nécessairement à 75 ans, soit pour 6 ans, renouvelables.

Bibliothèque

Cette pièce où l'on range les livres, s'appelait au Moyen-Âge : "librairie". Celle de Cîteaux, qui date des débuts de l'imprimerie, fut une des premières à être construite. Elle fut édifiée avant 1509, année de son achèvement, pour réunir un grand nombre d'ouvrages dispersés dans toute l'abbaye. Elle comporte au rez-de-chaussée une galerie de cloître sur laquelle s'ouvrent des cellules de copistes, et à l'étage la "librairie" proprement dite, à laquelle on accède par un escalier à tourelle.

Chapitre

Désigne d'abord la pièce du monastère où les moines se réunissent chaque matin pour entendre la lecture d'un chapitre de la Règle de saint Benoît - d'où son nom - et son commentaire par l'abbé. Après l'église, c'était un des haut-lieux du monastère, où les novices faisaient leur dernière demande d'admission en vue de la profession, qui, elle, était prononcée à l'église, après l'évangile. Mais c'était au chapitre que les convers faisaient leur profession. Là se tenaient les assemblées des moines pour les délibérations concernant les affaires importantes de la communauté et pour les élections d'abbés.La réunion des moines du monastère au chapitre dans ces circonstances importantes a pris le nom de "chapitre conventuel", du latin : conventus = réunion. C'est un deuxième sens du mot.Dans cette ligne, le "chapitre général", institué par Etienne Harding, est la réunion de tous les abbés au chapitre de Cîteaux, pour débattre des affaires de l'Ordre. Il se réunissait chaque année. Actuellement, vu le grand nombre des abbayes et surtout leur diffusion dans tout le monde, il se tient tous les 5 ans dans l'Ordre de Cîteaux et tous les 3 ans dans l'O.C.S.O.

La Charte de Charité

Ecrit dû à saint Etienne Harding qui réalise l'union des Monastères de l'Ordre en les regroupant en une seule famille, grâce aux relations entre maisons-mères et maisons-filles, et à l'institution du Chapitre Général qui réunissait une fois par an les abbés de l'Ordre. C'est un juste milieu entre l'indépendance complète de chaque monastère et la centralisation pratiquée alors par Cluny. La Charte de Charité appartient aux premiers textes cisterciens, avec principalement les récits de la fondation appelés : "exordes". ("Le Petit Exorde" et "l'Exorde de Cîteaux").

Cloître

Du latin claustrum : "enceinte", désigne d'abord l'enceinte du monastère, dans laquelle, selon la Règle de saint Benoît, on doit trouver tout ce qui intéresse la vie de la communauté. Par excellence, la tradition a réservé ce terme de "cloître" à l'espace clos autour duquel s'ordonnent les principales pièces du monastère, desservies par une galerie rectangulaire. On peut facilement établir un rapport entre l'atrium des maisons romaines et le cloître des monastères. Les premiers cloîtres monastiques apparaissent en Syrie au 5e siècle et étaient en bois. C'est vers 800 que l'on commence à construire des cloîtres en pierre. Mais le premier cloître de Cîteaux était encore tout en bois.Dans les abbayes cisterciennes du Moyen-Âge, sur le cloître, lieu de silence, de prière, de lecture, s'ouvraient les principaux lieux monastiques : l'église, le chapitre, le réfectoire, la cuisine, le chauffoir, le noviciat, le cellier ; le dortoir étant à l'étage. Du fait de cette disposition, le cloître était donc le coeur du monastère. Aussi ce mot est-il devenu synonyme de monastère dans des expression françaises comme "entrer au cloître".

Convers

Religieux ayant fait des voeux, membres de la communauté. Ils s'adonnaient surtout au travail et parfois servaient d'intermédiaires entre la communauté et le monde extérieur. Ils pouvaient vivre dans des "granges", exploitations agricoles aux alentours, qui dépendaient du monastère. Leur part à l'office divin était réduite au bénéfice du travail manuel. C'est pourquoi ils n'avaient pas droit au titre de "moines". Leurs responsabilités étaient d'ordre matériel, mais ils étaient soutenus par une vie commune, une prière régulière et par l'obéissance.

Définitoire

Le "Définitoire" est à la fois l'ensemble des définiteurs et le lieu où ils se réunissaient. Ceux-ci, au nombre de 25, étaient l'Abbé de Cîteaux et les 4 premiers Pères : les Abbés de La Ferté, Pontigny, Clairvaux et Morimont, plus 4 définiteurs élus dans chaque filiation. Ceux-ci préparent les questions du Chapitre Général, les délimitent, les "définissent" et leur proposent des solutions. Ils ne sont pas permanents à Cîteaux.De là vient le nom de "Définitoire" donné au bâtiment encore subsistant de l'ancien Cîteaux. Celui-ci fut commencé sous l'abbatiat de Dom Jean Petit et achevé avant 1699. Conçu pour recevoir le noviciat, alors commun à plusieurs abbayes, et le groupe des définiteurs, c'est un long bâtiment de 80 mètres sur 16, qui présente au rez-de-chaussée un belle salle voûtée, et une autre plus petite, sans doute la chapelle du noviciat. Il avait à l'étage le nouveau dortoir en cellules distinctes. C'est un bâtiment spécifique qui ne pouvait exister que dans l'abbaye chef d'Ordre.

Habit

Est celui que la Règle prévoit au chapitre 55 : "Deux tuniques, deux coules, un scapulaire, une ceinture". Le scapulaire était à l'origine un vêtement de travail posé sur les épaules dont les pans par devant et par derrière descendaient jusqu'aux genoux. La coule était le cucullus des romains, cette cape à capuchon qu'ils portaient pour se protéger des intempéries.Aux origines de Cîteaux, nos fondateurs ont repris l'habit prévu par la Règle, avec son exigence de pauvreté, donc ils l'ont voulu en laine brute, non teinte : dans les régions où les moutons avaient une toison blanche, l'habit était en laine écrue, dans les régions où la toison des montons était brune, en laine brune, comme en témoigne la célèbre miniature de Saint Waast d'Arras où saint Etienne porte une coule de couleur (voir illustration plus haut) . C'est en 1335 que la coule a été obligatoirement blanche et le scapulaire brun. Plus tard encore, au XVIIe siècle, le scapulaire est devenu noir. À la différence des Bénédictins, la ceinture maintient le scapulaire sur la tunique.Les novices portent un scapulaire blanc, une ceinture de toile et non de cuir, et une chape, au lieu de la coule, réservée à ceux qui ont fait leur engagement définitif. D'où l'expression : "être à la coule", ne plus être un novice.

Moine

Le terme
Le mot "moine", vient du grec monakos qui signifie : "un", "seul". Au début il était réservé pour désigner celui qui vivait seul, retiré à l'écart (anachorète), au désert (ermite). Par suite, les premiers "cénobites", (ceux qui vivent ensemble, en communauté) n'employaient pas ce mot, mais lui préféraient celui de "frères". Puis est apparu un sens plus profond de ce mot. C'est l'intérieur du chrétien, ermite ou cénobite, qui doit être "un" (monakos). Le moine est alors celui qui unifie sa vie selon un seul but que saint Benoît définira plus tard : "Chercher Dieu". Toute sa vie est tournée vers cette seule direction. Au 12e siècle, un cistercien, Geoffroid d'Auxerre fait la synthèse de ces deux sens : "Il n'y a de communauté unifiée que si les moines qui la composent cherchent d'abord leur unité intérieure".

Moine et prêtre
Dès lors, on comprend que la vocation du moine est différente de celle du prêtre, bien que tous deux soient appelés à un service d'Eglise, à un service exclusif de Dieu. Le moine est tourné vers la prière, source des dons de Dieu. Le prêtre dispense plus directement ces dons, surtout sous la forme de la Parole et des sacrements.Aux origines, dans les communautés monastiques d'Egypte, il y avait très peu de prêtres. Un ou deux par Centre, et ces Centres étaient formés de plusieurs centaines de moines. Le sacerdoce est alors surtout fonctionnel : le prêtre étant seul qualifié pour célébrer l'Eucharistie.Dans le monachisme occidental, jusqu'au Concile Vatican II, de fait, presque tous les moines choristes étaient prêtres, les convers, laïcs, n'ayant pas le titre de moine. Cette situation découlait d'une évolution remontant certes aux derniers siècles du Moyen-Âge, mais surtout dépendante de la notion canonique de "religion cléricale" appliquée aux Ordres monastiques.Actuellement, on entre au monastère pour être moine. Quand il le juge bon, l'abbé demande à l'évêque d'ordonner prêtres certains frères, en fonction des besoins du monastère.

Devenir moine
L'entrée dans la vie monastique est progressive. Celui qui désire embrasser la vie monastique commence par faire un séjour à l'hôtellerie ; il entre alors en contact avec le moine chargé des nouveaux frères et, si celui-ci le juge bon, il peut passer quelques jours en communauté, ce qui lui permet de faire davantage connaissance avec le monastère et les moines. Puis s'il persiste dans son désir, il demeure plus longtemps et devient postulant. S'il continue à se plaire au monastère, et si le Maître des novices et le Conseil de l'Abbé reconnaissent en lui des qualités pour être novice, il reçoit l'habit de novice, différent de celui du moine.Le noviciat dure deux ans durant lesquels il n'y a aucun engagement : le novice peut partir d'un jour à l'autre, s'il le désire. S'il persévère, et si la Communauté lui reconnaît les qualités nécessaires pour être moine, s'il "cherche vraiment Dieu", comme le demande saint Benoît, le Père Abbé l'autorise à formuler des voeux d'obéissance et de stabilité dans la communauté et le lieu, pour 3 ans (ou pour 1 an, renouvelables trois fois). Ensuite seulement aura lieu l'engagement définitif, pour la vie, au bout de 6 mois de postulat, 2 ans de noviciat et 3 ans de premiers voeux, qui peuvent être prolongés, soit donc environ 6 ans.

Prière continuelle

De tous temps les chrétiens se sont sentis interpellés par les exigences de l'Evangile : "toujours prier" (Luc 18, 1 ; 21, 36) et de saint Paul : "Priez sans cesse" (I Thes. 5, 17 - et aussi Eph. 6, 18). Le problème était de concilier les exigences de la vie courante, et notamment le devoir de travailler, exprimé aussi par saint Paul, avec cette exigence de prière continuelle. Après des interprétations un peu naïves, les spirituels découvrirent vite que les prières répétées établissent le coeur dans un état de prière. La charité établie à demeure dans le coeur y crée alors une prière simple, une orientation du coeur vers Dieu qui subsiste à travers les activités de la journée. Ce qui suppose des temps forts de prière au cours de celle-ci : les prières méritent la grâce de la prière.

Règle monastique

C'est un texte normatif, écrit par un Maître spirituel - ou à lui attribué - pour façonner une communauté. La Règle de saint Benoît, écrite en Italie, au Mont-Cassin, vers 540, s'inspire de Règles précédentes, surtout la Règle du Maître et celle de saint Augustin. Il fait aussi des emprunts aux Institutions de Cassien. Dans cette Règle, saint Benoît sait allier une profonde spiritualité à des règlements précis, tempérés par une sage discrétion. Elle insiste sur le rôle de l'abbé, mais sait mettre en valeur la charité fraternelle qui soude la communauté des frères. C'est là son génie, ce qui en fait un document exceptionnel, et ce qui explique que, recommandée par le pape saint Grégoire le Grand quelque cinquante ans plus tard, elle ne tardera pas à s'imposer et à devenir "la Règle des moines d'Occident.

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